A moins d’une semaine de l’ouverture de la COP22 à Marrakech (7-18 novembre) , lasuededurable était à Fès, la 2ème ville du pays très engagée sur les problèmes d’environnement et particulièrement sur les questions de l’eau, d’irrigation et d’épuration dans sa ville ancienne..
Pour un projet labellisé COP 22 de restauration du réseau hydraulique traditionnel de Fès datant du 12 ème siècle, Fouad Serrhini, le directeur de l’ADER-Fès (l’Agence pour le Développement et la Réhabilitation de la ville de Fès) a bien voulu nous présenter les enjeux des problèmes de l’eau pour le Maroc et plus spécialement pour Fès et sa médina.

Le grand répartiteur d’eau de Boujloud/Médina Fès
« L’eau sera donc au centre des préoccupations de la planète dans les décennies à venir. Réinterroger les techniques ancestrales de gestion de l’eau d’une ville comme Fès est l’occasion pour le Maroc particulièrement menacé de s’appuyer sur son passé pour construire l’avenir…
…Sur une superficie de 300 hectares, la médina de Fès est complètement équipée de 3 types de réseaux ayant des fonctions complémentaires. A tout moment de l’histoire de son urbanisation, la médina était équipée en infrastructure hydraulique…
…Près de 90 fontaines publiques dont une réservée aux chiens existe toujours dans la médina. Sur les 9000 maisons traditionnelles, plus de la moitié sont dotées de fontaines d’eau de source et parfois d’eau de rivières…
…Durant le processus de réhabilitation, le système de réseaux d’eau traditionnel n’a connu que quelques interventions ponctuelles à titre expérimental ou à l’occasion de restauration de sites dans le cadre des programmes de sauvegarde…
…En plus des leçons à tirer quand à l’optimisation de l’usage de l’eau, la réhabilitation du système des réseaux d’eau traditionnels et sa réadaptation au contexte actuel devient une nécessité, d’abord pour arrêter la dégradation du cadre bâti et répondre ensuite aux besoin de la population de ces sites historiques. Utilisons l’eau qui traverse naturellement notre cité et embellissons nos espaces naturels tout en économisant l’eau stockée et traitée…« .
(Extraits d’un article signé Fouad Serrhini dans Archi Maroc Sept/Oct 2016)
Fouad Serrhini est le Directeur Gèneral de l’Agence pour le Développement et la Réhabilitation de la médina de Fès, depuis 2000. Il assure à ce titre le programme quinquennal de restauration 2013-2017, doté de plus de 615 MDH (60M€) de l’Agence qui a fêté l’an dernier ses 25 ans.
Né en 1963, lauréat de l’Ecole Nationale d’Architecture de Rabat, promotion 1990, il est spécialiste du développement et de la gestion des tissus historiques. Il a supervisé plusieurs études opérationnelles ( Habitat, Artisanat, Tourisme, Environnement et culture en rapport avec le Patrimoine) en collaboration avec plusieurs instances nationales et internationales (Unesco, Banque Mondiale, Fond arabe pour le développement économique et social). Il fut le directeur de plusieurs projets relatif à la protection, le développement du Patrimoine et son insertion dans la dynamique économique et sociale (Restauration des monuments, mise à niveau des infrastructures des tissus historiques, traitement des problématiques environnementales, amélioration des conditions de vie dans le tissu historique,…etc.)… Il participe également à l’encadrement et à la formation des spécialistes du patrimoine ( Université Sidi Mohammed Ben Abdellah à Fès, Ecole Nationale d’Architecture, Institut Spécialisé des Métiers Traditionnels du Bâtiment).
« J’ai intégré la délégation à la sauvegarde de la ville de Fès en tant qu’étudiant stagiaire en architecture. J’ai assisté par la suite à la création de l’Ader en tant que stagiaire également en 1989 et j’ai intégré l’Agence une fois mes études achevées en 1990. L’Ader a commencé réellement ses activités en janvier 1991 et elle a évolué durant 25 ans avec ses difficultés, ses contraintes, mais aussi ses acquis et sa contribution importante dans la sauvegarde de la médina de Fès » raconte M. Serrhini
Et quand on lui demande pourquoi et depuis combien de temps il s’intéresse à ces histoires de patrimoine et de restauration, il répond: « Depuis toujours, depuis 53 ans…! ». Il a parait-il un nombre impressionnant de photos sur le patrimoine et les monuments historiques de sa ville natale qu’il a commencé à prendre quand il était étudiant en architecture il y a près de
20 ans . Il est également passionné d’astronomie.
Aujourd’hui donc directeur de l’ADER-Fès et de ses 65 salariés permanents + 35 intérimaires de ses ingénieurs, architectes et techniciens, il pilote un important chantier de sauvegarde de patrimoine: 27 monuments historiques, des médersas (écoles coraniques), des ponts (ci-dessus le pont de Khrachfiyine) , des forteresses, divers équipements… mais également des fondouks (ateliers d’artisans) et simples maisons (4.000 bâtisses) des habitants de la médina. La réussite de cette expérience pourrait servir de référence. » Oui, l’ADER-Fès est la seule structure privée/publique sur ce genre de mission au Maroc et elle est devenue un modèle et une référence pour les autres villes du royaume qui voudraient s’inspirer de son expertise pointue dans les métiers de réhabilitation développée pendant toutes ces années. »
Aujourd’hui, après 26 ans d’existence, l’ADER est devenue une structure très intégrée dans le tissu institutionnel et social de la ville de Fès. Et c’est grâce aux différents programmes lancés et financés aussi bien par le gouvernement et les ministères concernés ou dans le cadre de la coopération étrangère, que l’Ader Fès a pu développer une importante expertise en matière d’intervention dans son travail de développement et de réhabilitation en tenant compte des contraintes technologiques et environnementales.
Photos crédit: www.aderfes.ma